Ouais, le metal, c’est la puissance de la guitare et de la batterie, on est d’accord. Mais une autre caractéristique, c’est qu’il s’accorde avec n’importe quel autre genre musical. On parie que j’arrive à vous faire traverser les continents avec des mélanges totalement improbables ? J’ai extrait de mon Spotify une liste de 5 groupes metal « exotiques » qui vous feront voyager loin, très loin. Mes critères : du gros son qui tâche et des instruments, chants et sonorités traditionnels, sans les sempiternels cornemuses, vieilles à roue et accordéons du folk metal européen. Hey, après tout, le but de Zone Blanche c’est de vous faire découvrir des trucs improbables !
Plonger dans les eaux troubles du Mississippi avec Zeal & Ardor
La légende raconte qu’un jour, désireux de mettre à l’épreuve sa créativité, le musicien Manuel Gagneux a demandé sur un forum 4chan qu’on lui choisisse les deux styles de musique les plus antagonistes possibles pour voir ce qu’il pouvait en sortir. C’est ainsi que le son « negro-spiritual-black-metal » emblématique de Zeal & Ardor est né, comme une parfaite réinterprétation de ce qu’il se serait passé si les esclaves noirs américains avaient chanté pour Satan plutôt que pour Jésus. Voilà de quoi commencer cette liste de groupes metal chelous avec panache ! Nul doute que ce mélange inédit de gospel, blues et black metal saura vous transporter illico dans une maison Antebellum sur les rives du Mississippi, pile à l’heure pour une messe démoniaque, dérangeante et hautement ensorcelante. Ce soir, les champs de coton seront teintés de rouge.
Focus sur… Blood in the River
J’aime d’un amour inconditionnel la fureur pure qui s’échappe de ce prêche de l’enfer. Aux cliquetis des chaînes et aux chocs sourds de la grosse caisse s’ajoute une voix enfiévrée dans le plus pur style Negro Spiritual. Et puis les cris. Les cris ! qui se transforment au fil du morceau en hurlements glaçants, témoins discordants de la rage croissante qui agite les plantations de La Nouvelle-Orléans. Une rage immense, salvatrice, qui explose comme une bombe lâchée en plein milieu du morceau accompagnée d’une batterie furieuse, prête à en découdre avec le Planteur.
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Se prendre un choc culturel auditif en Inde avec Bloodywood
Quand on mélange les sonorités de Bollywood à la brutalité du metal, cela donne un son entêtant et hypnotique unique en son genre qui transcende le meilleur des deux mondes. Depuis les tréfonds de New Delhi, après avoir percé en réalisant des parodies made in India de Linkin Park, Bloodywood nous envoie une musique puissante, ponctuée de sonorités traditionnelles indiennes telles que le tumbi, la flute et les traditionnels tambours dohols, sans oublier les paroles écrites en anglais-hindi-punjabi. Des airs qui fleurent bon la grandeur des temples hindous, la nature sauvage du pluvieux Meghalaya ou la jungle impitoyable du Kerala.
Focus sur… Jee Veerey
Jee Veerey ( « Live, brave one ») a été écrite pour aider les personnes souffrant de dépression et qui sont assaillies de pensées suicidaires. Elle prend aux tripes avec une puissance à laquelle on ne s’attend pas en entendant la frêle mélodie de la flûte en introduction. En album ou en live, ce morceau mettra les larmes aux yeux de toute personne qui, un jour, s’est débattue de toutes ses forces contre ce démon écrasant et aliénant. Le son lourd caractéristique du metal déferle en nous comme un tsunami, nous écrasant au fond de notre siège, avant de nous porter au rythme des dohols, battements de cœur à suivre pour survivre, un appel d’air tonitruant et assourdissant pour vivre. En fil d’Ariane, la flûte indienne, toujours présente, si belle, si pure, si fragile et si forte à la fois, comme un espoir auquel se raccrocher alors que les basses nous bousculent, nous noient, nous assomment avec une intensité explosive. C’est un véritable hymne à la vie qui nous tend les bras, dans toute sa beauté, sa violence, sa brutalité, un combo épique auquel les sonorités indiennes apportent une dimension quasi spirituelle. Merde, j’ai une poussière dans l’oeil.
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Se perdre dans une version alternative de Versailles avec Igorrr
Il est fort probable que si le metal avait déjà existé à l’époque de Louis XIV, on aurait pu entendre du Igorrr résonner depuis la galerie des Glaces de Versailles jusqu’au Grand Trianon. Car oui, le Dieu de l’improbable Gautier Serre a décidé de mixer clavecin, electro et black metal dans un joyeux chaos baroque aux notes arabisantes, et il vit que cela était bon. Accompagné de growls terrifiants et d’une voix d’opéra qui pète complètement les plombs à un stade que jamais personne n’avait entendu auparavant, les sonorités musette-extrême d’Igorrr ne peuvent laisser indifférent : on adore ou on déteste. Celleux qui acceptent de se laisser porter au gré des parpaings sonores dans la gueule apprécieront leur royal séjour insensé.
Focus sur… Tout Petit Moineau
Je me rappelle encore le lundi où j’ai entendu cette chanson pour la première fois. J’étais, comme tous les autres jours, à mon bureau dans un open space. La seule chose qui disruptait quelque peu la routine à laquelle mon CDI m’avait condamné était ma playlist des Découvertes de la Semaine sur Spotify. Distraite, j’avais lancé ma playlist tout en essayant de venir à bout de ma to-do list, à la manière d’un Sisyphe et son caillou. Au premier abord, je n’ai pas vraiment prêté attention aux premières notes de piano et cette douce voix d’opéra qui résonnaient dans mon casque. « Hum hum », me suis-je dit, avant de retourner sur mon article. Et puis d’un coup, un bass drop et une étrange succession de sons électroniques mêlés de violon. « Hum hum ? », me suis-je dit, avant de retourner sur mes emails. Et puis d’un coup, un hurlement empreint d’une folie absurde m’a fait dresser les cheveux sur la tête, m’interrompant net dans mon travail. « ???? », me suis-je dit, avant de remettre le morceau au début pour comprendre ce qui venait de m’arriver, puis d’écouter en boucle toute la matinée ce hurlement primaire qui exorcisait tout le bien que je pensais de mon job.
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Dévaler à toute vitesse les steppes de Mongolie avec The HU
Des montagnes battues par les vents, des chevaux fougueux lancés au triple galop dans les steppes, des contrées désertiques et des guerriers un poil énervés : c’est en substance l’image que l’on se fait de la Mongolie sous Genghis Khan, et grosso modo ce que l’on retrouve dans la musique vindicative de The HU, bikers en sus. Les rythmes guerriers et odes à la culture du peuple mongol sont transcendés par la puissance du chant diphonique khöömii, bourdonnement qui fait frémir de bonheur nos tympans, ainsi que l’usage de la guimbarde, morin khuur et guitares mongoles. Créé en 2016, le groupe a depuis gagné un statut de héros national consacré par la médaille de l’Ordre de Gengis Khan et une monnaie officielle à son effigie. Rien que ça.
Focus sur… Black Thunder
Je sais pas pour vous, mais quand moi je m’imagine en Mongolie, je vois apparaître des hauts sommets enneigés, des fleuves impétueux, des déserts battus par les vents. Bref : la nature dans sa beauté la plus brute et la plus impitoyable qui soit. Alors quand on me propose de m’immerger dans un tel décor avec en fond sonore le grondement menaçant d’un orage qui déferle sur la plaine, je ne peux résister ! Black Thunder, c’est tout cela et bien plus encore, car lorsque rugissent les accords dissonants et entêtants des guitares électriques, la transe n’est pas loin et l’on fantasme partir au combat empli d’une hargne épique contre notre ennemi juré : Poutine, le capitalisme, l’URSSAF, le voisin qui a encore oublié de ramasser la merde de son clébard… à vous de voir.
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Pogoter sous les cocotiers de Jamaïque avec Skindred
Quel mélange improbable que le reggae et le metal ! Et pourtant, c’est une formule qui marche, à en croire le nombre de fans croissant de Skindred qui n’est pas tout jeune puisque créé en 1998, en plein pendant la vague nu-metal qui a rythmé nos années collège. Envie de retrouver vos jeunes années ? Le « nu-reggae » de Skindred vous transporte dans le monde merveilleux des sonorités catchy as fuck qui donnent envie de bondir dans tous les sens avec un walkman accroché à sa ceinture cloutée. C’est comme si Bob Marley avait été biberonné au System of a Down.
Focus sur… Kill The Power
Quand les premières notes de Kill The Power se sont élevées de la main stage du MetalDays 2016 (ndlr : un super festival metal qui m’a a été ma porte d’entrée vers la Slovénie), j’étais sur le cul. Je ne savais pas du tout ce que j’allais écouter (c’est l’avantage des festivals : la découverte aveugle) et je ne m’attendais pas du tout à ce qui allait suivre, bien que je m’interrogeais sur le look rasta-hip-hop du frontman Benji qu détonnait dans le décor. Kill The Power, c’est pour moi la quintessence de l’esprit Skindred : des tropiques, du gros son, un chant ragga groovy, de l’electro-hip-hop qui pulse et une énergie débordante qui donne la patate. De la pure vitamine D pour les oreilles.
À écouter sur…
Ce voyage en musique s’achève ici mais continue en commentaire. Vous avez du GROS SON QUI TÂCHE à rajouter à cette liste ? Faites péter vos meilleures découvertes pour faire grossir cette liste de groupes metal exotiques, et dites-moi si vous avez aimez ce que vous avez trouvé ici 🙂
Et oubliez pas de partager cet article, ça fait toujours plaiz’ !
© Crédit photo à la une : Alexandra Koeniguer
Géniales ces découvertes ! Je vais explorer ça, merci du partage 🙂