Si la Slovénie est un pays relativement peu connu, son carnaval l’est encore moins. Pourtant, il regorge de costumes traditionnels absolument incroyables ! Et si, au lieu d’aller à Venise ou Rio de Janeiro, vous zappiez le bain de foule pour faire un saut dans ce paisible pays, dont les déguisements effrayants font partie du patrimoine immatériel de l’humanité ?
Découvrez les différents costumes traditionnels slovènes !
Le Kurent, annonciateur des jours heureux
Le Kurent (ou Korent) est la figure emblématique du carnaval de Slovénie, et pour cause : son costume, appelé kurentija, ne passe pas inaperçu ! Vêtu d’un habit en laine, d’un masque (avec de longs poils de nez), d’une coiffe de plumes ou de cornes, de 5 cloches de vaches et d’un gourdin en bois, le Kurent est le bruyant annonciateur des jours heureux. Son rôle ? Chasser l’hiver et le mal dans les demeures slovènes ! Chaque année, de la Chandeleur jusqu’au mercredi des Cendres, les Kurenti font du porte-à-porte et bondissent autour des propriétaires pour apporter joie et bonne humeur.
Traditionnellement, les Kurenti sont animés par des hommes capables de supporter le poids du costume, et ce savoir-faire se transmet de génération en génération. Cependant, tout le monde peut endosser la peau d’un Kurent à présent ! Lorsqu’ils défilent dans la rue, les Kurenti récoltent les mouchoirs en tissus des dames, et parfois même des soutiens-gorges, en guise de remerciements pour leurs services. Enfin, ils entraînent les spectateurs dans des danses endiablées qui consistent à sautiller en tournant en rond. Ils sont accompagnés de vicieux personnages vêtus de rouge ou de noir (les Hudič – le diable en Slovène), qui n’hésitent pas à kidnapper les jeunes demoiselles. Leurs fourberies effraient souvent les enfants !
S’ils sont surtout originaires de la région de Ptuj, où plusieurs centaines de Kurenti ont défilé lors du 39e Kurentovanje, on peut également les trouver à Ljubljana (en petit comité) et dans d’autres villages. Le Kurent est tellement enraciné dans le folklore slovène qu’il a été inscrit en 2017 sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité.
« Dans notre monde moderne, compétitif, individualiste, égoïste, avec un penchant irrationnel pour la destruction de l’environnement, les Kurenti sont les ambassadeurs des changements sociétaux et culturels. Ils nous ramènent à une époque primitive où les humains vivaient en harmonie avec la nature et ses habitants. »
Fédération des associations Kurenti
Si vous avez vous aussi envie de vous déguiser à la mode « carnaval de Slovénie », voici une liste complète de leur équipement 😉
Les pères « fouetteurs »
Toute personne ayant les oreilles sensibles ne devrait pas s’approcher de ces gugusses. À l’inverse de beaucoup de costumes de carnaval de Slovénie, ces personnages défilent à visage découvert et assistent les Kurenti pour chasser l’hiver. Ceci se fait à l’aide d’un long fouet, qu’ils font claquer à de multiples reprises sur le sol dans un vacarme assourdissant. Assez dangereux !
Les Laufaridja de Cerkno
Cerkno est un village de Slovénie connu pour ses masques en bois de tilleul appelés larfe. Au total, 25 types de masques existent, représentant chacun une caractéristique ou une faiblesse humaine, dont l’ivrogne, l’homme méchant, l’aubergiste… Malheureusement, il y en avait assez peu lors du carnaval de Ljubljana ! J’ai quand même aperçu Pust, l’homme-sapin, tenu responsable de tous les enquiquinements qui se sont produits l’année précédente.
Il s’agit d’une tradition orale très ancienne qui s’est perdue après la Première Guerre mondiale. On doit la renaissance de cette tradition à Peter Brelih, un natif de Cerkno, qui a su convaincre la population locale de sortir les costumes du placard en 1956. Une exposition de ces masques est visible au musée de Cerkno 🙂
Le Škoromati et sa grande pince
Moins connu à l’international que le Kurent, il s’agit pourtant du plus ancien costume de carnaval slovène (il remonte à plus de 700 ans). Il se décompose en deux groupes distincts : les moches et les sympas.
Le clan des « moches » est reconnaissable de loin par une coiffe très haute, soit composée de décorations bleu, rouge et blanche, soit poilue, comme un Kurent. Il fait d’ailleurs autant de bruit qu’un Kurent puisqu’il twerke lui aussi avec ses cloches (avec plus ou moins de grâce). Il faut pourtant se méfier de ce personnage, car il n’hésitera pas à vous attraper dans ses grandes pinces s’il le peut. Son acolyte démoniaque tout de noir vêtu, le Škopiti, vous barbouillera ensuite la figure de suie (ndlr : ça m’est arrivé deux fois) !
Le clan des « sympas » comporte les Poberini, un genre de gardien qui entre à visage découvert chez les gens pour présenter ses voeux de bonne récolte. Il est parfois accompagné d’un Pepeljuhar, qui évoque une personne âgée répandant des cendres sur le seuil des maisons. On peut également citer le couple de jeunes mariés, qui représentent un bon présage s’ils décident de danser dans votre demeure. Toutes les autres figures de ce carnaval sont expliquées sur ce site web.
Le Rusa et sa vessie capricieuse
Si vous trouvez ce titre un peu chelou, sachez que je n’ai toutefois rien inventé : il s’agit d’un faux cheval (ou d’une vache) conduit par deux personnes, qui arrose les spectateurs depuis son popotin. Comme tout canasson heureux de gambader au milieu des primevères après un hiver à l’étable, il est intenable et fonce dans la foule et les magasins, en faisant claquer ses mâchoires, au grand désespoir de son gardien.
Les gitans de Dornava
Cette drôle de coutume nous vient du village slovène de Dornava, qui a accueilli pas mal de gens du voyage qui mendiaient en faisant du porte-à-porte. C’est en 1961 que les costumes de gitans font leur apparition au carnaval de Ptuj, jusque dans les moindres clichés, avec la volonté de « singer » leur style de vie si singulier. Ainsi, j’ai pu apercevoir beaucoup de faux gitans barbouillés d’auto-bronzant, la cigarette au bec, jouant aux cartes, en train de picoler ou de donner le biberon à des bébés en plastique. La procession des gitans est celle qui m’a le plus plu, car elle était extrêmement colorée et festive. Entre les accordéonistes, les fausses roulottes kitsch et les stands ambulants de barbaque, il y avait une bonne ambiance et de nombreux détails à observer !
Je ne vous ai présenté que les costumes traditionnels que j’ai vus à la fois à Ljubljana et à Ptuj. Cependant, chaque région a ses propres coutumes et déguisements ! Si vous souhaitez donc tout voir du carnaval de Slovénie, il vous faudra revenir chaque année pendant quelque temps entre février et mars 😉 Faites votre planning en regardant le site de l’office du tourisme !
Les autres costumes aperçus au carnaval slovène
Difficile de tous les citer, puisque le défilé de Ptuj a duré à lui tout seul 2h30. D’ailleurs, il était bien plus conséquent il y a quelques années encore, mais la municipalité a décidé de restreindre le nombre de cortèges, car il devenait difficile pour les Slovènes de rester debout aussi longtemps (c’est un natif de Ptuj qui m’en a fait part) ! Voici donc une sélection de ceux qui m’ont le plus plu.
La check-list pour vivre à fond le carnaval de Slovénie
- Aller à Ptuj, même si c’est à 2h30 de train de Ljubljana.
- Sautiller gaiement avec un Kurent ou lui faire un high five.
- Offrir un mouchoir en tissu à un Kurent.
- Se faire « pincer » par un Škoromati.
- S’éloigner de la rambarde dès qu’on entend un fouet claquer.
- Assister à la parade du dragon dans le centre historique de Ljubljana.
- Manger des pustni krof, ces beignets de carnaval fourrés à la confiture d’abricot, à la crème de vanille ou au chocolat !
- Venir déguisé, c’est encore mieux !
- Lire mon article sur mes 14 raisons d’aimer la Slovénie 😉
Le carnaval de Slovénie a été une très belle découverte pour moi, d’autant plus que j’affectionne particulièrement ce pays. C’est la 4e fois que j’y vais et je n’avais pas encore rédigé d’article dessus, honte sur moi… Le fait qu’il soit possible de naviguer d’un bout à l’autre des différents cortèges sans devoir pousser et s’excuser à tout bout de champ est également libérateur (pour moi qui n’aime pas les bains de foule). Un événement à mettre sur votre check-list carnavalesque pour les prochaines années !
Cet article est beaucoup trop chouette, gros coup de cœur pour ta série de photos; l’ambiance un peu étrange qui s’en dégage me plaît beaucoup.
Bonjour Jolies lueurs !
Merci beaucoup pour ton commentaire. J’espère que ces photos vont te donner envie de faire un petit tour dans ce coin ? 😉