En écrivant sur ma mauvaise expérience du Maroc, je ne fais clairement pas dans l’originalité : beaucoup se sont frottés au royaume chérifien et ont regretté leur choix. Mais là où les témoignages s’attachent à retranscrire l’attitude écœurante de certains Marocains envers les touristes, le mien est plus personnel. Il ne s’agissait pas que d’une histoire de harcèlement de rue et d’escroquerie : c’est tout un contexte qui a fait dérailler ce voyage au Maroc. Chroniques d’une traversée du désert aussi pénible que frustrante.

Préambule d’un voyage désastreux au Maroc

Statistiquement, quand on a la bougeotte, on devrait toujours finir par vivre au moins un voyage dont on se serait bien passé, non ? Mais les articles qui relatent ces échecs sont plutôt rares. J’ai donc décidé d’ajouter ma pierre à l’édifice des voyages foirés (mention spéciale à mon calendrier de l’Avent 2020), quitte à détourner certains internautes d’un pays qui a pourtant la cote. Mesdames messieurs, j’ai nommé : le Maroc, que j’ai découvert à la Toussaint 2023.

Médina de Marrakech
En allant dans la médina de Marrakech, on est certain de foncer droit vers la catastrophe ! (mais de manière esthétique, quand même)

Leçon n°1 : vivre les rêves d’autrui peut devenir un vrai cauchemar

Pour resituer le contexte, ce voyage n’était pas le mien. Je n’aurais jamais mis les pieds dans ce pays, si ce n’était pour accompagner ma mère qui souhaitait accomplir son rêve : voir le désert. Le Maroc n’a jamais été sur ma to-do list, même si j’étais éventuellement curieuse de voir le Sahara. Mais je garde l’esprit ouvert et je ne dis jamais non à une opportunité de découvrir le monde, même les coins qui sont aux antipodes de mes préférences. En tant que bonne fifille habituée à voyager, j’ai décidé d’aider ma mère fraîchement retraitée à apprivoiser le grand saut hors de nos frontières.

Certains diraient que, pour quelqu’un n’ayant jamais voyagé de sa vie, se fixer pour objectif de dormir dans le Sahara est un peu présomptueux. Mais ma mère est ambitieuse, et moi suffisamment rodée pour gérer ce périple de 10 jours, malgré mon peu d’intérêt pour la destination.

Au final, ça a été le seul voyage de ma vie où j’ai dû acheter des billets d’avion à prix d’or pour rentrer plus tôt que prévu (mais pas pour les raisons que vous pensez).

Voyage au Sahara au Maroc
J’annonce la couleur de suite : on a quand même réussi à atteindre l’objectif de ma mère malgré tout !

Leçon n°2 : choisir la promiscuité pour faire des économies n’est pas toujours un bon calcul

Je suis quelqu’un qui déteste partager mon espace. Seules exceptions : mon mec et mon chat. C’est la raison pour laquelle je n’ai jamais voulu vivre en collocation, dussé-je manger des Yum Yum pour boucler mes fins de mois. C’est aussi une des raisons pour lesquelles je suis partie du cocon familial dès ma majorité acquise, laissant ma mère polytraumatisée par l’enchaînement 18 ans -> baccalauréat -> permis de conduire -> déménagement, tout ça en un mois de temps (pardon Maman).

Mais pour ce voyage au Maroc, j’étais prête à faire une exception et à réserver des chambres avec deux lits simples. De quoi économiser un peu sur le budget total, sans sacrifier les jolis riads qui font intégralement partie de l’expérience marocaine. Ce qui paraissait une bonne idée en soi est devenu un gros problème, puisqu’il s’avérait que ma mère… ronflait. Beaucoup.

Moi qui avais encore la tête dans les nuages à 21h lorsque l’avion s’est posé à Marrakech, j’ai commencé mon voyage la tête dans le cul le lendemain matin, malgré les boules quiès.

Riad à Marrakech
Les riads sont vraiment magnifiques. Malheureusement, pour pouvoir s’en payer un sans trop dépenser, il a fallut faire des concessions sur la taille de la chambre qui était bien trop petite pour deux.

Leçon n°3 : quand on vous dit que les Marocains harcèlent les touristes, c’est vrai

Je vais probablement me faire des ennemis avec ce chapitre, mais il faut dire les choses telles qu’elles sont : les vendeurs marocains sont CASSE-COUILLES. On m’en avait déjà parlé, mais je ne prenais pas la mesure de l’omniprésence des sollicitations intempestives.

Alors oui, nous avons débuté notre voyage au Maroc par la médina de Marrakech. Oui, c’est ultra-touristique, oui c’est bien connu qu’on s’y fait alpaguer dans tous les sens. Mais j’étais loin de me douter que ça allait être à ce point, moi qui étais habituée aux marchands thaïs qui tentent, mais n’insistent pas (trop). Et je ne parle même pas du marchandage, où ils essayent systématiquement de nous faire payer 5 fois le prix réel et vous insultent si vous n’achetez rien. Je parle de ces individus qui, dès que vous marquez une pause de 2 secondes pour vous orienter dans la médina, vous alpaguent alors que vous dites non une fois, deux fois, dix fois, et vous tiennent la jambe sans lâcher prise. Le harcèlement de rue, au Maroc, c’est un art de vivre.

Marchand à Marrakech
Ce marchand n’a pas hésité à soutirer 25 € à ma mère pour un bout de tissu probablement made in China. Les gérantes de notre riad ont manqué de s’étouffer en apprenant ça. Prix de vente dans les autres zones touristiques du Maroc où nous sommes passées : 5 € max (sans les fils qui pendouillent).

Ils vous suivent malgré vos refus et vous obligent à leur donner de l’argent pour vous avoir « montré le chemin », puis vous insultent quand vous opposez une fin de non-recevoir et campent devant le musée dans lequel vous vous êtes réfugiés (Marrakech).

Ils vous déshabillent du regard et vous sifflent quand ils vous croisent, juste parce que vous êtes une meuf (Ouarzazate).

Ils s’improvisent gardiens de parking et tentent de vous extorquer de l’argent pour avoir « surveillé » votre voiture de location sur le parking gratuit de votre hôtel (Ouarzazate).

Ils sont à l’affût, prêts à sauter sur tous les distributeurs de billets ambulants étrangers qu’ils croisent. Tout est sujet à être monnayé, et au final, il ne vous reste plus de votre voyage au Maroc qu’un arrière-goût, suffisamment amer pour effacer les bons échanges que vous avez pu avoir. Il ne vous faudra pas longtemps pour ne plus oser entrer dans une boutique ou regarder un étal, de peur de vous faire insulter si vous n’achetez rien, ou de vous faire arnaquer si vous achetez. Surtout à Marrakech, que les locaux surnomment Arnakech.

On retiendra de tout ça la formule magique « Demain, Inch’ Allah », seule à même de vous dépêtrer de ces marchands extrêmement insistants. Voyager au Maroc vous amène à mentir et à vous en remettre à la volonté d’un dieu quelconque pour obtenir la paix, et j’ai détesté ça.

Leçon n°4 : la street photography n’est pas possible quand la street entière jauge la taille de votre porte-monnaie

Il est très probable que vous passiez par la médina de Marrakech lors de votre séjour, et on peut comprendre pourquoi : le labyrinthe des ruelles, les portes colorées, les rayons de soleil qui percent à travers les tissus tendus de part et d’autre d’une rue sont extrêmement photogéniques. Il y a énormément de petits détails à voir, de scènes de rue inspirantes, d’architecture emblématique du Maroc.

Tout photographe a donc forcément l’envie de sortir son appareil photo, mais c’est un piège ! Car dès que vous vous arrêtez, quelqu’un va tenter de vous vendre un truc. Même quand on s’intéresse davantage à l’architecture ou aux ambiances de rue très globales, ça nécessite de s’arrêter, ce qui équivaut à une invitation tacite pour se faire aborder, surtout si vous vous affichez avec plusieurs milliers d’euros de matos en main (ce qui n’est pas spécialement conseillé). C’est donc extrêmement frustrant de voyager à Marrakech en tant que photographe.

Mes astuces : 

  1. Les chats : photographiez les innombrables félins qui peuplent la ville, ce sont des sujets intéressants et ça fait rire les locaux, qui bizarrement ne tentent plus de vous détourner de votre prise de vue.
  2. L’ultra grand-angle : cet objectif permet de prendre des photos de scènes de rue tout en orientant l’objectif vers le haut (ou vers le côté du sujet). C’est assez fourbe mais efficace pour photographier une ruelle sans que quelqu’un se sente visé.
  3. L’imprimante de voyage : j’ai acheté une mini-imprimante (Canon Zoemini 2) et j’offre un tirage avec la photo que je viens de prendre, rapidement importée sur mon smartphone et retouchée vite fait sur Lightroom Mobile. Quand vous voulez faire un portrait d’une personne, demandez-lui la permission et expliquez-lui ce que vous comptez faire de la photo (valable pour le monde entier).

Le reste de mon voyage a été plutôt relax sur ce plan. Nous avons loué une voiture à Ouarzazate et avons roulé jusqu’à M’Hamid, en passant par Zagora. J’aurais vraiment adoré photographier davantage, dans ce climat beaucoup moins hostile qu’Arnakech, si je n’avais pas eu à me frotter au boss final de mon voyage au Maroc…

Leçon n°5 : l’expression « désert médical » peut aussi être interprétée au sens littéral

Nous avions atterri le mercredi soir, et dès le samedi ça a commencé à se corser pour moi. Je veux dire, outre le manque de sommeil, le comportement détestable de certains Marocains et le fait que je ne pouvais pas photographier ce que je voulais. En cause cette fois-ci : mes règles (avec le package habituel des menstruations douloureuses).

Le lendemain, j’ai pris sur moi pour crapahuter dans le magnifique Ksar d’Aït-Ben-Haddou. Mais courant d’après-midi, j’étais tellement HS que j’ai demandé à rentrer à l’hôtel. Au fil des heures qui ont suivi, la fièvre est arrivée : « Tiens, j’ai pas ça habituellement ». Et elle est restée. Pendant une semaine.

J’ai commencé à avoir mal à la gorge. Puis des maux de tête. Je toussais. Le nez qui coule. Impossible d’avoir accès à un test Covid, à moins d’aller aux urgences. Mais j’étais motivée par notre objectif premier : accompagner ma mère jusque dans le Sahara. Je pouvais pas abandonner en si bon chemin, alors que nous venions d’arriver à Ouarzazate, aux portes de désert !

J’ai pris sur moi et je me suis automédicamentée du mieux que j’ai pu. Mais la fièvre était toujours là. Et ce nez qui coule. L’air était si aride et poussiéreux (moins de 10 % d’humidité) que ma toux était omniprésente. Je me suis tellement mouchée que j’ai commencé à saigner du nez. Une fois. Deux fois. Dix fois . Et à flots, à chaque fois. Mais nous avons continué notre route. À Zagora, exténuée, j’ai craqué pour réserver deux chambres séparées, espérant dormir un peu. Puis direction M’Hamid, puis un trajet en 4×4 de 2h, et voilà enfin le désert du Sahara.

Atlas au Maroc
Le trajet en voiture jusqu’à M’Hamid, en traversant l’Atlas, était cependant magnifique et me permettait d’oublier un peu le reste.

Du côté de ma mère, tout allait bien. Moi, j’étais dévorée toute crue par l’angoisse et la frustration de ne pouvoir profiter pleinement de cet instant unique. Mes saignements de nez étaient tellement impressionnants que j’avais peur de me vider de mon sang au milieu des dunes, loin de tout médecin, dans l’expression la plus pure de ce que « désert médical » pouvait signifier. Le vent faisait voler le sable, des grains si fins qu’il faut les toucher pour le croire. Éternuements à répétition. Toux exacerbée. Voix transformée. Curieuse nuit d’Halloween que ce bivouac au milieu de nulle part, la peur chevillée au corps et assommée par la fièvre.

Dromadaire dans le désert
Ombres chinoises de dromadaire sur le sable

Désert du Sahara au Maroc
Avouons-le, être dans le désert du Sahara ça fait quand même quelque chose, même si on déteste les climats arides.

Après cette escapade dans le désert, je n’étais plus capable de continuer, et nous étions tombées d’accord sur le fait que retourner à Marrakech comme prévu initialement était hors de question. Nous sommes donc reparties de l’aéroport d’Ouarzazate deux jours plus tard, moi dissimulant maladroitement mes toussotements.

Dès le lendemain de notre atterrissage, direction le médecin. Bronchite et suspicion de pneumonie. « Ah mais vous savez, il faut absolument éviter les milieux arides quand on a une bronchite », me dit-on, pendant que je mouchais des grains de sable.

Une semaine après mon rétablissement presque complet, je retombais malade. Covid.

En conclusion, je dirais que si ce voyage au Maroc était désastreux de mon point de vue, ce n’était pas le cas pour ma mère (heureusement, c’était quand même elle la protagoniste principale). Comme quoi, même en partant à plusieurs, voyager reste avant tout une expérience très personnelle… Cela me fait quand même bien suer parce que c’était mon premier périple en Afrique, pour une première impression c’est un peu nul ! En tout cas, jamais de la vie je remettrai les pieds dans Marrakech. Le reste du Maroc ? C’est pas un non catégorique, mais faut vraiment qu’il y ait des arguments solides pour que j’y retente ma chance. Autrement dit, j’ai mieux à faire pour l’instant.

Et vous, quelle expérience avez-vous de votre voyage au Maroc ?


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